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Clause bénéficiaire "mes héritiers" : la recherche de la volonté du souscripteur est nécessaire (Cass.civ.2.14/12/2017)

Au décès de l’assuré, les capitaux-décès issus d'un contrat d'assurance-vie sont versés aux bénéficiaires désignés. Il n’est pas nécessaire que ces bénéficiaires soient nommément mentionnés dans la clause : ils doivent simplement être définis de manière suffisante pour être identifiés.

La désignation des "héritiers" comme bénéficiaires est valable, mais elle demeure imprécise et peut être parfois à l’origine de difficultés d'interprétation, notamment en présence d’héritiers et d’un légataire universel.

Dès lors, c'est la volonté du souscripteur que le juge doit rechercher et qui permettra d'identifier la ou les personnes bénéficiaires du capital-décès. La notion d’héritier n’est quant à elle pas déterminante.

Telle est la règle réaffirmée dans l’arrêt rendu le 14 décembre 2017 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation. Elle considère dans cette affaire que l’intention de la souscriptrice-assurée était de transmettre les capitaux-décès au légataire universel et non à ses héritiers légaux( Cass.civ.2, 14 déc.2017, n° 16-27206 non publié au Bulletin)

La désignation des héritiers comme bénéficiaires des capitaux-décès d’assurance-vie est fréquente mais peut entraîner des difficultés d’interprétation lorsque l’assuré a désigné en parallèle un légataire universel.
En cas d’ambiguïté, le versement des capitaux-décès dépendra donc de l’interprétation souveraine des juges du fond.

Afin d’éviter les contentieux, il est recommandé de rédiger le plus clairement possible la clause bénéficiaire du contrat d’assurance-vie et d’éviter la mention vague "mes héritiers" qui peut être ambiguë dans l’hypothèse où l’assuré désigne un légataire universel par testament.

La clause bénéficiaire doit effectivement être rédigée de manière non équivoque afin de déterminer si le légataire universel est ou non bénéficiaire des capitaux-décès.
Le plus simple sera d'envisager une désignation nominative en prévoyant des bénéficiaires de second rang...

Mais l’assuré pourrait aussi désigner :
- "les héritiers légaux" s’il entend appliquer la dévolution légale, et, par conséquent, exclure le légataire universel du bénéfice des capitaux-décès ;
- "les ayants-droit à titre gratuit" s’il souhaite tenir compte de ses dispositions de dernières volontés, et donc que le légataire universel intègre les bénéficiaires du contrat.

Cependant, dans ces deux derniers cas, on entrevoit une possibilité d’interprétation aléatoire d’un juge selon la chronologie de la souscription du contrat, de la désignation des bénéficiaires et de la rédaction du testament.

Il est fréquent que le souscripteur-assuré d’un contrat d’assurance-vie désigne comme bénéficiaires ses héritiers.
En pratique, cette désignation peut être effectuée à titre principal, par choix, ou à titre subséquent, afin d’envisager l’absence ou la renonciation des bénéficiaires de premier rang, mais aussi être parfois imposée par le juge lorsque le souscripteur-assuré est sous tutelle.

Une telle désignation bénéficiaire est imprécise et source de contentieux, notamment lorsque le souscripteur-assuré désigne en parallèle par testament un légataire universel.
L’interprétation du juge peut alors s’avérer nécessaire, la jurisprudence concernant cette question étant abondante.

A cet égard, un arrêt fondateur rendu par la Cour de cassation le 4 avril 1978 a tout d’abord affirmé qu'en l'absence d'héritiers réservataires, l'intégralité du montant du contrat d'assurance-vie revenait au légataire universel en tant que seul héritier (Cass. civ. 1, 4 avr. 1978, n° 76-12.086).

Une première réponse ministérielle (RM Roubaud, 17 juin 2008, n°8657) a repris cette solution en constatant que la jurisprudence de la Cour de cassation retenait ainsi une interprétation large du terme "héritier", et qu’il convenait de se référer au pouvoir d’appréciation souverain des juges du fond.

Une seconde réponse ministérielle (RM Laffineur, 28 juill.2009, n°44814) a estimé que l’adjonction du terme '"ayant-droit" permettait d’inclure non seulement les héritiers légaux mais également tous les successibles dont le légataire universel.

​Par la suite, la jurisprudence retient la nécessité de rechercher la volonté réelle du souscripteur. La chronologie entre la désignation bénéficiaire et la rédaction du testament donne parfois un indice (Cass. civ. 1, 11 mai 2016, n° 15-10.447). Le terme d’héritiers légaux est traité de même : il n’exclut ni les légataires universels ni les légataires à titre universel, mais il importe de rechercher la volonté du souscripteur (CA Paris, 25 avr. 2017, n° 16/03371).
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